Au service du handicap


Ce projet en direction de publics adolescents souffrant d’obésité est une expérience menée depuis 2005 auprès de 80 jeunes de 14 à 18 ans.
L’action se déroule à l’Institut St-Pierre-de-Palavas (34) dans une Unité Diététique Médicalisée (UDM). Le club support OK Mistral, dans l’Hérault, a été choisi par la commission Hand’Icare.

C’est son moniteur, Michel Trouillet, qui assure la réalisation technique et pédagogique du projet.
« Pour cette action, j’agis en complète autonomie après avoir élaboré et adapté des contenus en étroite collaboration avec les interlocuteurs éducatifs et médicaux de l’unité de soins. Je rends compte régulièrement sur les plans pédagogique et budgétaire du projet. L’action est financée par des fonds européens, le ministère des Sports, le département et des fonds privés.
Cette action se déroule sur une période de 6 mois auprès de 4 groupes de 10 adolescents de 14 à 18 ans. J’interviens avec une fréquence de 1 à 2 séances de 3h30 hebdomadaire. Je suis aidé, lors de chacune de mes interventions, par 1 à 2 éducateurs spécialisés. Les jeunes, impliqués, souffrent d’obésité grave et de problèmes fonctionnels et psychiques. Le projet est réalisé dans les locaux et sur les espaces de plein air (plage et terrains de sports) de l’Institut Saint-Pierre de Palavas qui est un établissement hospitalier privé à but non lucratif. Il participe au service public hospitalier. Il est géré par l'Oeuvre Montpelliéraine des enfants à la mer (O.M.E.M), c’est une association loi 1901 reconnue d'utilité publique depuis 1922… »

Les particularités du public

EnvolLes jeunes accueillis en UDM souffrent d’obésité chronique et de pathologies consécutives à leur état : problèmes articulaires plus ou moins graves, déformations au niveau vertébral, problèmes psychologiques, difficultés relationnelles... Certains ont subi des opérations et sont appareillés ; ils sont suivis par des psychiatres, des éducateurs sportifs et kinésithérapeutes, des médecins nutritionnistes.
Pour aborder ce projet il convenait de bien appréhender cette forme de handicap, méconnue du grand public. Tout d’abord être convaincu qu’il s’agit bien ici d’un véritable handicap et de personnes en souffrance issues de milieux sociaux différents. Connaître ensuite les particularités de ce handicap aux conséquences psychologiques et relationnelles graves : le handicap de l’obésité isole et culpabilise celui qui en souffre par l’image qu’il a de lui même, le regard (voir le rejet) des autres.
Le jeune affecté réagit soit en s’enfermant dans son état sans perspectives d’en sortir, soit réagit par une agressivité exacerbée. Parallèlement les capacités physiques des personnes sont inégales et réduites d’où une adaptation des supports techniques du projet et des progressions (à la fois collectives et individualisées).
Le premier soucis, en abordant cette mission complètement nouvelle (types des publics et collaboration avec un personnel médical), fut d’intégrer les caractéristiques et les besoins du public à impliquer ainsi que les objectifs visés par l’équipe éducative et médicale. Pour cela un travail de formalisation fut entrepris avec les différents acteurs : la direction de l’institut, l’éducateur chef ayant en charge le service UDM ainsi que la psychologue et le responsable de la commission Hand’Icare, Jeff Fauchier.
Suite à cette réunion, les axes du projet et son cadre ont pu être posés.

La demande spécifique de l'établissement consiste à prendre en compte un handicap méconnu : l'obésité des adolescents et à impliquer les participants dans une démarche favorisant le lien avec les autres et la sociabilité. Les jeunes doivent aussi par ailleurs s’impliquer dans des activités physique adaptées et acceptées. Une approche approfondie des caractéristiques du handicap a permis de concevoir des projet et des supports pertinents.

Trois pôles

Dans le cadre du projet 2006 nous avons proposé de travailler sur 3 pôles :

La formation du personnel d’encadrement (éducateurs, animateurs, professeur EPS…).
L’objectif consiste ici à donner les éléments théorique, techniques, logistiques et pédagogiques permettant aux acteurs d’être autonomes et de mieux intégrer cette activité dans le projet de vie des groupes accueillis en UDM. Cette action peut se faire dans le cadre de la formation continue dispensée par l’organisme de formation professionnelle (OFP) de la FFVL.

Une action éducative autour du support.
Le rôle du moniteur consiste ici à transmettre des informations et des enseignements en rapport avec l’activité (références culturelles et historiques, environnement de la pratique, aspect techniques et sécuritaires, accompagnement au pilotage et progressions par les parcours Acrokite…).

Une action créative relayée par les psychologues de l’établissement.
Travail sur l’image de soi par des séances photos animées par les jeunes et un transfert de ces photos sur les cerfs-volants réalisés.Construction

Les différentes étapes

La formation
Formation des acteurs ayant en charge l’encadrement des activités éducatives et sportives de l’UDM.
Aspects théoriques du cerf-volant (mécavol, aérologie, logistique, matériel, disciplines…).
Techniques des activités de pleine nature cerfs-volistes.
Techniques des ateliers de construction et de maintenance.
Pédagogie spécifique de l’atelier et des APPN « cerf-volant ».
Mises en situations avec un public.

La découverte
En s’appuyant sur des supports vidéos et le matériel volant la première étape consiste à sensibiliser les jeunes aux différentes pratiques du cerf-volant et particulièrement les activités de pilotage et les sports Kite. Des séances de vol avec des matériels diversifiés (deltas, acrobatiques 4 lignes, ailes tractives et acrobâches, envol collectif de grandes structures).

La construction
La construction d’une aile « Acrobâche » comporte un ensemble d’étapes avec plusieurs niveaux de difficultés : tracé et découpe des laizes de spinnaker, assemblage et couture, pose des brides et maîtrise des noeuds, réglages et équilibrage des lignes, tests et corrections… Le travail manuel de la construction d’un cerf-volant nécessite des gestes précis et de la rigueur. Réaliser un objet volant est une démarche exigeante sanctionnée par le vol ou non de l’objet ainsi que par sa performance (maniabilité, rendement, force tractive…).

La personnalisation
(extrait du CR 2005)
« Pendant le déroulement du projet collectif, le moniteur a soumis aux jeunes l’idée de personnaliser chaque cerf-volant par les photos de chacun. Malgré la réserve et le scepticisme, certains ont accepté de se laisser photographier. Après un traitement des images, à l’aide d’un logiciel, plusieurs portraits ont été soumis aux groupes. Tous ont admis que sous cette forme il trouveraient l’idée de personnalisation intéressante...
Nous nous appuierons sur l’expérience 2005 pour conduire cette partie déterminante du projet : le travail sur l’image de soi . L’objectif est ici de faire accepter l’idée de se regarder sur le document photographique (numérisé), puis de retravailler cette image individuellement. De soumettre les images transformées au groupe et de faire appel aux avis du groupe à partir de règles de comportements et de relations positives et constructives (améliorer et modifier jusqu’au choix du modèle à transposer sur le cerf-volant). »

Le travail créatif et artistique
A l’aide de transparents et d’un rétroprojecteur, chaque participant peut transposer son image sur la partie centrale de son aile tractive. Ce travail peut être réalisé indépendamment des séances animées par le moniteur FFVL. Nous pensons que prolonger, de cette façon, les activités cerfs-volants sur les temps de vie, permettrait une intégration meilleure encore de l’ activité et favoriserait l’appropriation du projet par chacun des jeunes. Un travail à la peinture acrylique vient compléter chaque réalisation.
Pas peu fiers
Le projet partagé collectivement
Chaque jeune réalise son image sur un panneau de tissu rectangulaire, l’ensemble de ces portraits stylisés serait ensuite monté en un seul cerf-volant (fresque volante) dont les dimensions conduisent à un pilotage collectif et une action en équipe
Cette production serait appelée à être présentée sur des rassemblements cerfs-volistes dans la région. Cette fresque peut être complétée au fil des projets en cas de pérennisation de cette action.

Communiquer
Par la proposition de deux axes de communication :
L’écris : par la réalisation d’un journal du projet qui servirait de base à la rédaction d’articles destinés à être publiés (presse régionale, journal de la fédération, sites Internet…).
L’image : par la photographie et la vidéo relatant les étapes et les temps forts du projet. Des interviews pourraient venir compléter le contenu d’un film ou clip destiné à être proposé au concours du film de vol libre de la coupe Icare 2006..

En conclusion…


Ce projet s’est enrichi de l’expérience innovante de 2005.
Nous souhaitons, par une meilleure prise en compte des spécificités du public adapter et proposer des supports qui pourraient constituer des démarches rééducatives profitables aux acteurs éducatifs et médicaux de l’UDM de l’institut St-Pierre. La richesse des supports du vol libre permet de nombreuses applications éducatives et pédagogiques.
Cette première expérience « pilote » est appelée à être pérennisée et à essaimer vers d’autres établissements spécialisés et vers d’autres publics souffrant de handicaps moteurs ou mentaux.

Michel Trouillet